Retour au village

Reithyr en perdit la voix. Subjugué par la scène, il en oubliait de répondre. Bouche grande ouverte, il venait d’assister à la métamorphose d’une panthère noire en une femme aussi taquine que mystérieuse. Tours un petit rictus au coin des lèvres, elle lui adressa :

« Tu sembles plus prompt à discuter avec une panthère qu’avec une femme… »

Elle ponctua sa phrase par un haussement du sourcil droit, comme si elle s’interrogeait sur l’étrangéité de la situation. Cette petite mimique lui donnait un air délicieusement coquin.

A ces mots, et cette grimace, notre héros sourit, il aimait décidément l’esprit de cette femme. Mais n’arrivait point à se défaire du coté irrationnel de la scène.

« Pardonnez-moi, mais je ne m’attendais pas à tout ça, je ne suis qu’un humble explorateur, un peu perdu et puis… je ne suis guère présentable à une dame, veuillez-m ‘en excuser »

La dame, justement, lui répondit :

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  • Réponse A : Elle l’invite à se laver dans l’eau claire de la cascade.

« Tu parles comme un prince habillé en haillon » s’amusa-t-elle à dire.

Et toujours de sa douce voix et d’un ton enchanteur, accompagnée d’un geste de la main bienveillant, elle lui glissa :

« Les ronces et les pierres n’ont pas épargnés tes vêtements, les branches et les chutes n’ont pas épargnés non plus ta peau. Baignes toi… » puis elle ajouta d’une voix plus douce et plus basse encor « … avec moi »

L’invitation était alléchante, il est vrai que l’on distinguait de moins en moins la couleur de sa peau, recouverte de terre par endroits. Ses vêtements déchirés n’avaient que trop mal supportés l’expédition et sa blessure à la cheville devenait de plus en plus douloureuse. Mais il hésitait, un bon bain, en charmante et mystique compagnie, oui, mais il ne pouvait décrocher son regard du serpent, toujours enroulé autour de sa maitresse.

Elle vit toute son inquiétude, et souhaita le rassurer sur ses intentions. Elle lui dit alors de ne rien craindre ici, si ce n’est lui-même. Puis, sans qu’aucune explication plausible soit possible, l’eau se mit à monter, doucement mais de manière tout à fait anormale. La créature divine fit quant à elle un pas en arrière, ce qui automatiquement l’immergea un peu plus dans l’eau montante, arrivant jusqu’au bas de sa poitrine. C’est alors que le serpent se détacha délicatement de sa jambe comme de sa taille… il ne recouvrait désormais que la partie supérieure de cette femme qui à mesure que le serpent glissait, laisser place à l’eau arrivée désormais pratiquement au niveau de son cou. Enfin, le serpent se détacha complètement en ondulant sur la surface de l’eau et disparu plus loin.

Ils étaient dès lors seuls… dans cette immense jungle empli d’animaux féroces et de pièges naturels à foison. Il lui était simple maintenant de savoir où et quoi regarder, seul le visage de la belle étrangère dépassait de l’eau. Il ne pouvait désormais plus faire machine arrière.

Reithyr retira alors, sans un mot, mais sous le regard curieux et attentif de la jeune femme, son caban déchiré ou quelque chose qui y ressemblait vaguement. Puis une nouvelle couche, une sorte de protection en cuir léger, plus adapté pour le combat que pour l’exploration. Enfin, vint sa chemise, il se savait observé, mais encor plus lorsqu’il retira son vêtement de soie. Ses larges épaules apparurent, et le vent se tut. Il dévoila alors son large poitrail, et l’eau lui sembla frétiller. Un buste puissant et fort supportant des bras taillés dans l’acier. Il retira ses bottes, boueuses au possible, et de ses grandes mains il retira en deux temps son pantalon en haillon et ensuite ses jambières, elles aussi plus adaptés au combat qu’à l’exploration en jungle hostile.

Simplement vêtu de son pantalon en très légère toile de lin il plongea dans l’eau, en direction de celle qui ne pouvait être réelle. Son visage était désormais nettoyé et ses cheveux comme son corps mouillé laissaient dorénavant ressortir toute la noblesse de son corps. Elle s’avança alors vers lui à son tour et faisant cela, laissa sa superbe et généreuse poitrine dépassé de l’eau. Il ne put s’interdire de la regarder, puis concentrant ses yeux vers le visage de la belle sirène, il lui demanda :

« Comment t’appelles-tu, si tu as un nom ?»

Elle s’approcha encor un peu plus, jusqu’à être à portée de main. Reythir avait stoppé son avancée à la fin de sa question, mais pas elle. La douce et lumineuse panthère humaine s’approcha encor puis encor plus jusqu’à littéralement poser sa poitrine contre le torse de notre héros, puis lui glissa une main derrière le crane, pour redescendre sur sa nuque. Les frissons parcoururent toute l’échine et toute l’âme de Reithyr, elle approcha alors sa bouche de son oreille, et lui murmura son nom….

 

  • Réponse B : Elle lui indique par où aller.

« En effet, tu sembles avoir subi plus d’un outrage, les ronces et les pierres n’ont pas épargnés tes vêtements, les branches et les chutes n’ont pas épargnés non plus ta peau. Bois, cette eau est délicieuse. Mange, ces baies sont comestibles. »

Reithyr ne se fit pas prier et s’approcha des baies sauvages pour en en remplir une main bien pleine. L’eau en effet était délicieuse, à n’en pas douter, cette cascade devrait être marquée sur une carte. Il mangeait, il buvait, et la confiance le regagna petit à petit. La belle inconnue et son grand serpent n’avait qu’à peine bougé depuis tout ce temps, et Reithyr, en qualité d’invité, se sentit de faire la conversation.

« Merci pour ton aide, j’ignore comment tu fais toutes ces choses et comment tu es apparue, mais merci. Tu es qui ? ou quoi ? L’esprit ou la déesse de la forêt ? Et pourrais-je au moins connaitre ton nom ?

Le sourire de la belle ne la quittait jamais, jouant de toutes les variations possibles qui peuvent vous dire tout et son contraire. Ses yeux expressifs, ses lèvres qu’elle mordait de temps à autre et son corps presque nu, la rendait aussi envoutante que sibylline. Elle s’amusa du mot déesse et lui répondit que si cela lui chantait, elle le serait volontiers. Elle ajouta bon nombres d’autres informations que celui qui était désormais repu ne comprit pas. Il buvait ses paroles presqu’autant que l’eau du lac, et pourtant il n’en comprenait que la moitié. Ses paroles étaient limpides mais la résonnance de sa voix semblait s’alourdir de minute en minute. Ne voulant point vexer son hôte, il ne fit pas remarqué son état et continua tant bien que mal la discussion. Après tout, cela lui manquait, qu’importe qui cela pouvait être, mais cela lui manquait de pouvoir échanger avec quelqu’un, autre qu’une panthère muette ou une voleuse de harpie.

« Sais-tu comment je peux rentrer chez moi ? »

Elle lui répondit que oui, et qu’à l’aube, il lui faudrait partir. Malheureusement, le trouble auditif revint, et il ne perçut pas distinctement tout ce que disait la douce naïade. Elle lui parla d’un rocher en forme de murène, d’un sentier empli de fourmis et aussi d’une caverne mais dans quel ordre, et pourquoi, il n’arrivait même plus à le distinguer. Sa vue aussi baissait, se troublait. Il était évident que notre héros perdait pied, physiquement, psychiquement. Il ferma les yeux un instant, juste quelques secondes, pour se sentir mieux. Et quand il les ouvrit à nouveau, elle se tenait face à lui, puis la paume de la main sous la bouche, elle lui souffla délicatement dessus… il ferma alors les yeux sur son angélique visage toujours aussi souriant….

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…. Un léger souffle, frais, qui lui fit ouvrir les yeux, constatant le grand astre qui se lève, de ces rares moments en forêt où vous pouvez voir le soleil sans encor être certain qu’il fait jour.


"Natacha, tu es magnifique"

Thierry MARTIN - 29 juillet 2017